« Les esprits ont évolué »
Entretien avec Richard Thomarat, maître d’armes historique du Cercle de la Buse, à Saint-Denis.
- Comment êtes vous arrivé à La Réunion et depuis quand êtes-vous maître d’armes dans le Bas de la Rivière ?
- J’étais militaire dans les troupes de marine en Nouvelle-Calédonie quand j’ai entendu parler de La Réunion pour la première fois. De retour à Montpellier, j’avais le choix entre retourner dans le Pacifique ou venir ici. Et j’ai choisi La Réunion, où j’ai débarqué en mai 1988. En tant que sous-officier, j’étais le maître d’armes désigné à la caserne Lambert. J’étais militaire 24h/24 mais j’allais à la salle d’escrime de la Buse trois fois par semaine. Le club avait été créé en 1984 par Maître Cima, un ancien de Joinville. Et à la fin de l’année 1991, j’ai dû prendre ma retraite anticipée à l’armée et j’ai donc pu me consacrer pleinement à mes fonctions à la Buse.
- En plus de trente ans d’exercice, quelle(s) évolution(s) majeure(s) avez-vous pu constater concernant la pratique de l’escrime ?
- Ça c’est beaucoup démocratisé. Les esprits ont évolué. On le doit à Maître Arrighi dans les années 70 et un peu plus tard à Maître Leconte, CTR dans les années 80, qui a importé la pratique dans les écoles. L’escrime n’est pas le sport d’une élite sociale. C’est que nous nous efforçons d’inculquer à la Buse. Notre objectif premier est de s’ouvrir à tout le monde et d’aller vers les gens. Et le second est d’emmener les jeunes vers le haut niveau. C’est la raison pour laquelle nous ne pratiquons que deux armes de pointe (épée, fleuret).
- À l’instant T, aucun tireur réunionnais n’a encore pris part aux JO. Est-ce envisageable dans les années à venir ? Et si oui, serait-ce une forme d’aboutissement pour l’escrime 974 ?
- Cédric Loiseau (épéiste formé à la Buse) n’était pas loin d’y parvenir dans les années 90 mais une entorse à la cheville (en jouant au tennis) l’a empêché de faire les sélections. Après, il est sûr que les Jeux représentent beaucoup. Au club, nous sensibilisons les jeunes très tôt sur la perspective olympique sous la forme d’un contrat moral. Voir un tireur réunionnais aux Jeux serait un énorme jour pour l’escrime péi. Quand on voit la résonance qu’ont eue les performances de Laura Flessel (double championne olympique) en Guadeloupe, c’est évident.
Photo: Pierre Marchal