La 19ème édition qui s’est déroulée le 28 juin à Vannes, aura mis les voiles sur de nouveaux horizons, dont l’île de La Réunion : la Dionysienne, Adeline Vitry, y a créé la sensation en finissant 24ème au scratch, 2ème F derrière l’indétrônable Stéphanie Gicquel du Stade Français (Paris). Côté masculin, la barre aura été fortement rehaussée avec un temps stratosphérique de Freddy Prigent du S/L CA Morlaix : seulement 14 h 23 pour boucler les 175 km avec 1 500 m D+ (alors que l’estimation était donnée en 15 h 45, au plus tôt) !
Pour cette nouvelle édition de l’Ultra-Marin de Vannes on peut noter que l’offre s’étoffe :
Parmi les 9 formats attirant plus de 10 000 coureurs, un tout nouveau cette année : « Le Réveil des Ducs », 70 km, épreuve nocturne menant du château de Suscinio à Vannes ; outre l’épreuve phare, le « Grand Raid » 175 km, sont proposés : le « Grand Relais » 175 km, le Raid 100 km, « l’Arvor » 56 km, la « Ronde des Douaniers » 34 km, la « Vénète » 29 km, la « Course des Marins et des P’tits Marins » (pour les 3 à 10 ans), le « Grand Défi Solidaire » (relais de 10 coureurs sur le 175 km pour soutenir une association au choix).
– Des inscriptions qui s’affolent :
Un record du nombre d’inscriptions s’est fait aussi en un temps record… Il n’aura guère fallu plus de 2 jours pour atteindre un remplissage à 50%, et juste une semaine pour que toutes les épreuves affichent complet !
– Courir vraiment vert :
Outre la nécessité du gobelet personnel, il est désormais obligatoire de se munir d’un kit couverts afin de réduire les déchets. L’organisation utilise des piquets indicateurs en bambou avec bandes réfléchissantes et rubalises récupérables. L’eau est fournie par des rampes connectées au réseau local afin de réduire sensiblement les plastiques. Plusieurs réseaux de navettes avec des Pass sont disponibles afin de limiter le nombre de voitures. Souscrivant à la charte de qualité du CROS Bretagne, l’Ultra-Marin est membre du réseau DIOREN, afin de promouvoir la transition écologique du sport en Bretagne.
Les 2 Terres de Trail, La Réunion et la région Bretagne, renforcent leurs liens
– Initiatives partagées des copains de l’Ultra « binationaux » : bretons et réunionnais…
Depuis que l’élite bretonne, l’ami Jeannot Jacquement, – encore fringuant athlète ayant fêté ses 85 ans l’avant-veille de l’Ultra-Marin – parla du Grand Raid de La Réunion sur les courses BZH, les rapprochements n’ont cessé de croître entre les traileurs des deux régions. En 2000, le breton d’adoption Gilles Dielh, alors licencié de l’AL Ploemeur, gagne la Diagonale des Fous, main dans la main avec le Saint-Louisien Thierry Técher! Cet acte symbolique a été fondateur d’une grande histoire du trail, et qui se poursuit dans une belle dynamique.
Nous sommes de ceux qui aiment autant arborer le drapeau réunionnais sur des ultras bretons que faire flotter le Gwen Ha Du derrière nos sacs en Diagonales des Fous… A 10 000 kilomètres près, nous partageons fraternellement la même passion sur les deux territoires.
Dans le sillage de l’élite glénoise du trail, Arnaud Moisan, j’ai couru avec plaisir l’Ultra-Marin 2023 – il avait fini l’édition 2019, 32ème en 23 h 35 -, y récidivant cette année avec la même satisfaction. En 2020, je l’embarquais sur une 2ème « Marche des Cimes » (Diagonale pionnière) ; et lui de m’inviter cette année sur l’exigeante course d’orientation en binôme, le « Poon Tour », (113 km, 6000 m D + et 7000 m D -), y finissant 3èmes, juste 18 jours avant ce 175 km Ultra-Marin… (C’est dire ma conception particulière de la récupération…)
– Solidarité solidifiée entre Les Côtes d’Armor et La Réunion dans le marché du trail :
La principale compétition, impliquant tous les figurants (qui en sont plus ou moins conscients) et pas seulement les quelques élites qui font le spectacle devant eux, se joue entre les marques. Si Salomon et Compressport se disputent les parts de marché à Chamonix, (le spot fondateur de l’entreprise mondiale UTMB), en Bretagne, c’est la marque locale Kinétik, – fondée près de ma ville natale, Saint-Brieuc, le chef-lieu des côtes d’Armor -, qui sort du lot. Elle est devenue cette année le Master Partenaire de l’Ultra-Marin. Mais cette marque est aussi la 3ème à La Réunion où elle fait un carton, avec sa part de marché la plus dynamique !
– De plus en plus de traileurs conjuguent Trail réunionnais et Ultra-Marin breton :
Il devient difficile de citer tous les noms des réunionnais présents à l’Ultra-Marin 2024, sur ses différents formats. Concernant le Grand Raid 175 km, Sandy Cousin – avec qui j’ai eu le plaisir de faire un petit bout d’entame -, Maxime Dujardin, Daniel Guyot, Alexandra Martinez – quelle sympathique et vaillante coureuse avec laquelle j’ai partagé un bout de chemin, avant de remettre un peu les gaz à 15 km de l’arrivée ! -, Adeline Vitry, phénoménale…
Evidemment, outre mes propres récidives sur la Diagonale, beaucoup d’autres adeptes de l’Ultra-Marin l’ont aussi courue tel, Ait Oumghar Brahim… A côté de notre traversée péi, il faut dire que la boucle ultra marine n’est quand même pas la mer à boire pour des ultras marins réunionnais forgés dans nos montagnes…
Est à souligner l’intention d’élites réunionnaises, tel l’ami Frédéric Duchemann doué d’une très grande vitesse, de venir courir le Grand Raid Ultra-Marin. Dans le sillage d’Adeline Vitry, le scratch masculin pourrait ainsi connaître une nouvelle surprise de taille venant de La Réunion.
Le déroulement de cette édition
En début de parcours, la forte affluence était plus sensible, et on a même connu quelques petits bouchons sur les sections monotraces, au moins jusque Séné Cousteau, au 30ème km. Ce fut aussi le cas plus avant, aux gros ravitos proposant des repas chauds (et toujours excellents…) ; notamment à Sarzeau Salle Cosec. Plus loin, la décantation n’aura pas été aussi marquée qu’en 2023 ; et il a été rare de se retrouver seul quelques instants au fil du parcours, même en pleine nuit sur l’exigeant sentier venté de Saint-Gildas-de-Rhuys.
L’an passé, il a fallu gérer le très froid et farineux coup de vent nocturne ; cette année, même si la fin de nuit s’est avérée assez fraîche pour devoir y sortir le K-way (sur maillot et seconde couche), ce fut la lourdeur diurne dans la pétole, qui s’est avérée difficile.
Le balisage a été amélioré, notamment par la présence de flèches rouges au sol.
Je me suis souvent retrouvé – au point de susciter un lien enjoué – au sien de la dynamique équipe tractant avec entrain, la goélette occupée par l’ancien rugbyman de haut niveau, Pierre Tarance, devenu tétraplégique suite à un plaquage en 2010. En lien avec d’autres organismes, comme la Fondation Albert Ferrasse et le Rugby Espoir Solidarité, « Pierre qui roule » œuvre pour un sport inclusif. Les contraintes techniques du parcours, montées et descentes raides, sable, roches…, ainsi que les barrières pour empêcher l’usage du vélo, rendaient l’exercice bien difficile.
Bilan
- 1 600 partants sur le 175 km, 1 012 à l’arrivée, soit un taux d’abandon de 36%.
- 1 600 bénévoles sont sur le pont, soit exactement le même nombre que de coureurs sur le Grand Raid.
Outre l’incroyable vitesse du vainqueur à plus de 12 km/h, avec une augmentation exponentielle du niveau global, à temps de course égal, nos classements reculent sérieusement. On observe néanmoins moult abandons déjà avant la mi-course, et beaucoup de traileurs qui en finissent épuisés, boitant, strappés… Contrairement au G.R.Réunion qui permet de se refaire la cerise ici ou là, au GR.Ultra-Marin, le coinçage fait d’autant plus mal que ça roule fort… Comme toujours, une gestion optimale fait défaut chez beaucoup; ça part globalement beaucoup trop vite pour une telle distance, aux taquets dès le début, à contre-courant du raisonnable ; et les dégâts s’avèrent importants pour la suite; l’addition est souvent salée…
On constate l’implication de nombreux clubs, teams, associations sportives… Originaire de Trémuson, – l’un de mes deux camps de bases en métropole avec Gèdre-Gavarnie pour les montagnes -, je soulignerai la valeureuse participation de la jeune et dynamique association « Courir à Trémuson », aux beaux maillots bleu marin et jaune soleil qui vont bien : sur le Raid 100 km, Laurianne Chaise, Pierre Guillou, Benoît Lemaitre ; sur la Ronde des Douaniers 34 km, Kévin Le Bigot, Fanny Le Louët, Aurélie Rault. (Aucun trémusonnais cette année, sur le Grand Raid ; ah si, moi-même ! Et je ne doute pas que le Président du « Trail des Mines » de Trémuson – dont je recommande la version 26 km le 22 septembre -, l’ami Guirec Le Chevanton, y participe bientôt…). Le parcours de l’Ultra-Marin traverse déjà 16 communes, mais combien d’autres sont impliquées par la participation de leurs coureurs !
Perso, cumulant pas mal d’ultras ces derniers temps, pas du genre à me faire mener en bateau ni à baisser pavillon, – et donc veillant aux grains en vieux loup de mer -, j’ai géré plutôt gentiment cette belle boucle. Conforme à mon SAS 2, – prévision entre 25 et 30 heures -, j’en ai mis 27 (top 5 de cat.). C’est certes une demi-heure de plus que l’an passé, mais je suis bien en forme à l’arrivée, les jambes légères, ce qui me permettra de me relancer sur le « Trail de l’Ic » – un autre si beau parcours entre terre et mer ! – le week-end d’après.
Vers une navigation hauturière…
Le grand Golfe du Morbihan, avec un patrimoine naturel d’exception et reconnu comme une des plus belles baies au monde, offre un cadre vraiment unique pour une course très atypique. Attractif, à tous points de vues… L’Ultra-Marin a tout pour bien naviguer vers son anniversaire l’an prochain : 20ème édition ! On observe qu’il prend le large sans faire de vague…Tout en renforçant un ancrage local, notamment avec son nouveau Master Partenaire, non seulement la participation se renforce depuis des horizons lointains comme La Réunion, mais on entend souffler un abordage de l’UTMB… Nul doute que l’Ultra-Marin saura garder le cap pour arriver à bon port ! Bon vent pour une navigation désormais en haute mer!
Les podiums
Masculin :
- Freddy Prigent, S/L CA Morlaix, en 14 h 23, (l’an passé en 16 h 06 derrière Vivien Laporte, 15 h 45)
- Matthieu Boquet, S/L OC Gif sur Yvette, en 15 h 00
- Christian Drean, CIMA Pays d’Auray, en 15 h 22
Féminin :
- Stéphanie Gicquel, Stade français (Paris), en 16 h 33, encore 1ère l’an passé en 18 h 39 (9ème au scratch)
- Adeline Vitry, La Montagne Athlétisme, en 18 h 14
- Marine Cherouvrier, Athlétic Pont-Renan, en 19 h 36
Texte et photos Daniel Guyot