Alors que de nombreuses courses à La Réunion se retrouvent annulées en raison de la crise sanitaire, de nombreux traileurs réunionnais profitent de leur passage en métropole pour participer à des compétitions. C’est le cas de Daniel Guyot, Mireille Velia et Arnaud Moisan. Récit de trois compères en terre bretonne.

De même que la Bretagne a su gérer au mieux la crise Covid en faisant prévaloir la raison et la responsabilité tant sur les croyances et les traditions que sur les communications extérieures, de même, elle a su conserver une très bonne dynamique sportive locale. Des épreuves bien rodées continuent de s’y dérouler dans de bonnes conditions, et sans trop en faire sur les protocoles, mais avec bon sens, aussi bien en matière de trail que sur route… Voici deux épreuves représentatives auxquelles j’ai participé consécutivement :

– Le samedi 24 juillet à 16 heures, le « Red EoTrail Gwerlisquin » (de Guerlesquin), – épreuve phare du challenge Armorik-Trail 2019 avec celle de Brasparts, et que nous avions courues avec entrain -, a encore rassemblé de chevronnés coureurs.

– Le dimanche 1er août à 7 heures, le marathon de Saint André des Eaux a pu fêter sa 40ème édition avec des ultrafondus en provenance de tout l’hexagone et dans des dispositions quasi normales.

Acte 1. Trail « Hent Ménez Arrée », 26 km de sentiers exigeants pour environ 1000 D+.

A la faveur d’une pause dans mes gros travaux paysans des côtes d’Armor, je mets le cap au Wild-West breton. Il fait un temps de chien à Guerlesquin, au creux terreux du Finistère. Cependant que je me gare avec ma vieille caisse sur l’ancienne place de grande foire en cette célèbre citée désormais désertée, Arnaud Moisan arrive avec sa grosse bagnole sportive rutilante… Le ton est donné. Le champion est très attendu, qui a eu les honneurs de Ouest-France, journal quand même le plus diffusé en Métropole, pas vrai Manu, son ambassadeur à La Réunion… Même les comparses d’Arnaud à la “Team Cilaos” n’auront jamais eu idée de sa réelle aura en BZH… Perso, après la réitération réunionnaise des 100 km, j’étais plutôt calé sur un « Breizh-Trip » dont le socle serait Trémuson-Paimpol (vallées jusqu’au Légué, puis GR 34) et plus si affinités… Mais je me devais d’assister au show de la fratrie Moisan ; la jeune championne Solène sera 1ère F sur le 15 km (« Ribinoù Kozh ») ; le frérot Yoann, 5ème sur le 7 (« Breizh-Run »), et Arnaud, 10ème sur le 26… A rebours de cette option performative, j’avais annoncé que je prendrais cet inespéré tout 1er dossard 2021 – N° 44, celui du département à reconquérir patiemment… – dans un esprit cool, en mode rando-trail pour prendre le temps d’apprécier, (d’autant que j’ai marathon le week-end suivant, avec une descente dans les Pyrénées dès le lendemain, en vue d’escalader des sommets…) Je décolle néanmoins assez vite aux côtés d’Arnaud afin de savourer l’ambiance en traversant la ville, puis, la campagne atteinte, je me laisserai décrocher gentiment en saluant les copains qui me doublent, parmi lesquels l’ami Dominique Nédélec ne manque pas de déclamer mon petit pedigree au peloton. Je me retrouve tranquillement à savourer le parcours tantôt champêtre, tantôt sauvage, avec Virginie Geffroy (M2 de 1976) aux couleurs d’Endurance-Shop Lannion ; je finis par la laisser dans la plus grosse pente – même à près de 10 km heure au fil de sentes techniques, on devient vite un traînard, vu le niveau élite de la meute – et franchirai la ligne à plus de 30 minutes au regard de la dernière édition où j’étais 1er de Cat en 2h36 ; pas trop fatigué des abattis pour le coup, je fanfaronne en photos devant les beaux monuments du Bourg avec Arnaud qui est déjà en « savates la ruelle »… A noter qu’une randonnée pédestre pour les 3 distances, au choix, (« Bale Toal Kalon ») partait à 14 h. Si l’ambiance de cette manifestation multi épreuves n’était plus du tout celle de la dernière fois, soulignons néanmoins l’intention de cette vaillante “Team Guerlesquin”, quelque peu remaniée mais résistante…

Acte 2. Marathon de Saint André des Eaux, la restauration d’une institution…

Contrainte de faire comme tout le monde l’an passé, – annuler sur injonctions déboulant d’en haut… -, l’organisation, fortement soutenue par la municipalité, a cette fois tenu bon, et d’une belle manière ! Chaleureuse et généreuse. Pour une inscription de 20 euros, on se voit offrir un superbe coupe-vent joliment estampillé ; on est chouchouté par des ravitos au top ; on boit et on mange à volonté ; on reçoit un diplôme personnalisé à l’arrivée… Et nous, les réunionnais présents depuis des années, nous sommes toujours particulièrement bien accueillis, comme si c’était un retour dans une famille… Que ce soit sur les podiums où sur la ligne d’arrivée, Mireille est toujours invitée à prendre le micro (1er exercice de récupération auquel elle se plie volontiers, pas encore pour chanter comme aux mariages campagnards du coin – on est restés sobres -, mais pour causer des courses et entraînements sur notre île)… Christelle Mesnage est là qui fait un reportage photos au top tout en s’improvisant experte ambianceuse…

Ce fut un sacré plaisir de retrouver les fidèles, l’ami élite Mickaël Jeanne – qui détient en France le record de Finisher du 100 km – ; William Guillot, éternel ultrafondu européen avec qui j’ai fait une bonne partie des championnats de France du 100 km, avant qu’il ne fasse quelques pauses techniques dans les champs ; idem pour Franck Pennors côtoyé à Cléder, et je pourrais en citer tant d’autres… Ce marathon bien bosselé tend à opérer une sélection de vieux briscards très aguerris. Ce n’est évidemment pas le lieu pour battre un record dans ce format, mais pour courir un marathon d’exception – et le 3ème plus vieux de France – dans une rare ambiance conviviale.

Comme toujours, ma mise sur orbite est assez tonique et je prendrai une vitesse de croisière correcte avec des bonnes sensations d’un bout à l’autre, mais sans trop pousser après le 30ème comme je l’avais fait en compagnie de l’illustre Gérard Racinne, la dernière fois. J’arrive donc 34ème (scratch) au lieu de 20ème l’édition précédente, mais quand même 2ème de Cat. sur pas mal de coureurs dans ce créneau d’âge. Mireille en termine 70ème, 7ème F.

Dans la bonne humeur et en bonne intelligence par laquelle les consignes sur le respect des gestes barrières ne sont pas adressées à la sauce réunionnaise comme à des enfants capricieux, mais solidairement respectées dans l’évidence – on n’a pas à vérifier le Passe Sanitaire, on n’a pas à surveiller le bon port du masque, etc. – le marathon de Saint André des Eaux démontre qu’avec peu de moyens et dans le contexte de la crise sanitaire, on peut continuer dans une perspective de responsabilisation de chacun, à proposer de conviviales compétitions.

Contrairement à La Réunion où les autorités n’accordent pas leur confiance au monde sportif hors stade, la région Bretagne, à la fois ouverte et disciplinée, n’a cessé et continuera de proposer des épreuves avec discernement, en y accueillant chaleureusement les réunionnais. J’espère qu’on pourra rendre la pareille à la très forte représentation bretonne lors de la Diagonale des Fous 2021, sans les tristes allégations de l’an passé… En tout cas, tous les réunionnais, Natacha, Léane, Brieg, Arnaud, Mireille, moi, et les autres… ont repris l’avion pour le caillou, dûment testés négatifs au Covid, mais très positifs en ce qui concerne leurs saines escapades bretonnes…

Texte et photos Daniel Guyot

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Daniel Guyot
Daniel Guyot est le recordman absolu en termes de Diagonales achevées. En trente ans de grandes traversées depuis la Marche des Cimes, il est le trailer le plus assidu. A 60 ans, Daniel Guyot aura passé la moitié de son existence à courir après celle qui affole son palpitant depuis trois décennies. Une certaine Dame Diagonale. L'histoire de La Réunion étant intimement liée à celle de la Bretagne depuis les origines, il n'est finalement pas si étonnant que ça qu'un Breton le soit également à celles du Grand Raid.

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