Annulé une première fois le 12 janvier 2020 (sur problèmes d’organisation), puis de nouveau le 7 février 2021 (en raison de la crise Covid), le 1er Semi Marathon Littoral Nord qu’avait imaginé l’AAM (Association d’Athlétisme de la Marine) s’est finalement déroulé en mode « OFF » aux date et heure prévues sur Sport-Pro, dans le respect des règles sanitaires.

Parmi les objectifs principaux reconduits cette année par les « Intrépides du Nord », figurent :
– La réactivation de courses emblématiques empêchées (« 10 km de Ste Suzanne », « Camélias Raid », « Course de Takamaka »…)
– Le maintien d’une dynamique sportive – en particulier à l’endroit des non licenciés et amateurs – dans des formats variés (route, trail, course de côte, bike & Run…)
Cette fois-ci, nous ferons un focus sur l’intégration dans notre groupe d’une jeune néophyte pour qui la crise Covid a été l’occasion de se lancer dans le sport comme alternative aux sorties festives empêchées. Puisse-t-elle servir de modèle, éclairé par son témoignage. Elle nous prouve que sans passé sportif significatif, il reste possible de se mettre à courir avec bonheur. Mais s’attaquer d’emblée à un semi, c’est un sacré pari ! Tout un art d’équilibriste entre motivation et pondération…
Dans le département français programmant le plus de courses à pied avec les Côtes d’Armor, nos épreuves sur routes concernent essentiellement le 10 km… Contribuant au rayonnement de nombreuses villes réunionnaises, outre l’accueil de pointures kenyanes au célèbre semi-nocturne de St Denis, ces 10 km ont fait l’objet d’un challenge en 2019. (Mireille s’est classée 3ème au scratch féminin et 1ère V1 à l’issue des 5 courses, et moi 12ème au scratch masculin et 1er V3). Nous avons la plus longue et difficile épreuve d’ultra-trail, – notre Diag’ étant même la plus « mythique » d’après le journal sportif de référence, « L’Équipe »… – réservée à des coureurs très expérimentés, mais nous nous cantonnons aux plus courtes et accessibles à tous sur la route… L’engouement pour le trail s’est approprié l’exclusivité de la grande endurance… Le semi-marathon se fait rare ; un seul marathon annuel réunit peu de coureurs ; il arrive même qu’aucun marathon n’ait lieu dans l’année ; quant au 100 km, l’île l’ignore ; ne parlons pas des 24, voire 48 heures…
L’endurance sur route est pourtant bien moins traumatisante que le trail, et s’avère excellente pour travailler la dynamique, la foulée, et le cardio. Le 100 km et le marathon constituent en réalité les épreuves les plus conformes aux aptitudes humaines fondamentales. (A cet égard, je conseille la lecture de « Bêtes de courses », Bernd Heinrich, éditions Guérin/Paulsen, 2020.) Ces courses à pied au long cours peuvent d’ailleurs se pratiquer à des âges avancés. J’ai encore fini le dernier marathon bien bosselé de St André des Eaux (couru une quinzaine de fois) en 3h17, 20ème au scratch ; et la moyenne de mes 4 derniers 100 km demeure sous les 10 heures.
Nos engagés sur ce semi répondent à une parfaite parité féminines/masculins, ainsi qu’à une grande amplitude d’âges, d’expériences, et de niveaux. C’est donc dans un esprit consensuel (modalités du contexte social, type d’épreuve, biographie des participants…) que nous abordons notre 1ère compétition 2021. Entre le 10 km explosif sollicitant la résistance et le marathon basé sur l’endurance, le semi doit trouver les plus justes adaptations… A 46 ans, je courais encore le semi en 1h16 avec une VMA évaluée à 19.61 (championnats de Bretagne) ; à 56 ans, en 1h26 (championnats de La Réunion.) A l’opposé de mon expérience de plus vieux de la bande, la plus jeune, Laurence, – avec comme seules compétitions antérieures deux « 10km nocturnes de Saint Denis » et un « Trail des Anglais » en mode soft -, fait ses tous premiers pas dans cet exercice difficile. En voici sa restitution qui pourrait s’avérer inspirante pour beaucoup, sur cette île frileuse pour le format dans lequel elle s’est lancée :
« Mon tout premier semi-marathon…
Je n’ai jamais couru plus de 10 km et, à vrai dire, je n’aime pas courir… En revanche, j’adore crapahuter en montagne, marcher et marcher encore, courir un peu mais pas longtemps, quand je me sens en forme et souhaite tester mes limites… Mais surtout, j’adore admirer les plus beaux paysages de La Réunion et me baigner dans les bassins…, cela depuis un an et demi…
6 février, Messenger, 10h24, message d’un certain Daniel… « Souhaites-tu participer à un semi-marathon ? »… 21,100 km… WAOW ! Sur le coup, c’est WAOW !… Mais après tout, je me dis que c’est dans la tête … Pourquoi n’en serais-je pas capable ? J’accepte cette proposition, la veille pour le lendemain…
A deux pieds, de bonne heure et de bonne humeur, rencontre avec les participants, distribution de dossards… Quel rêve, on dirait presque une vraie compétition officielle! Top départ à 6 h 42, dossard accroché, briefing OK, et me voici lancée dans cette première expérience, mon 1er semi!
Le son dans les oreilles, premières foulées, je suis seule avec moi-même et mes pensées… Je visualise tout le chemin à parcourir ; je sais qu’il risque d’être long ; je ne sais pas si je vais y arriver mais je me dis que sans essayer on ne peut pas le savoir… Allez, Go, petites foulées… On y va ! Pour me rassurer, je me dis que je peux toujours faire demi-tour si jamais c’est vraiment trop dur… Je me sens bien, il fait encore bon à cette heure ; au fil d’objectifs intermédiaires, les km passent et on se rapproche de la fin… La chaleur se fait épuisante… A 9h, le soleil commence à taper !
Je me motive, je « m’auto-fais la morale » quand je me sens défaillir, mais dans l’ensemble j’avance, je cours, j’écoute de la musique qui m’entraîne et je pense à ma fille Eva… C’est mon leitmotiv, je lui dis souvent : « Tu as deux jambes, tu as deux bras, sers-en-toi » ! Ainsi, je ne peux pas abandonner parce que nous avons de la chance de pouvoir courir!
Et voilà, 21km et 100 m plus tard, la boucle est bouclée : j’arrive en 2h29 ; je me suis arrêtée un peu et ai marché sur la fin mais j’ai tenu bon ! J’ai trouvé cette course et cette expérience super chouettes ! A refaire sans modération… Enfin, quand même un peu… »
Laurence Servan Fontaine, notre héroïne du jour, s’est vue tout naturellement attribuer le dossard N°1 ; à notre élite, Patrick Rubel, revenait le N° 2 ; au Président, Eddy Paquiry, le N°3 ; à la superviseuse Mireille Vélia (1h42 au semi, 3h50 au marathon), le N° 4 ; à la championne de triathlon de l’île, Béatrice Bit, le N°5 ; il me restait le N°6. Chacun a franchi la ligne d’arrivée avec satisfaction. Le Comité Directeur a été invité par Laurence à prendre un pot ayant donné lieu à un sympathique débriefing…
Cependant que les sportifs amateurs sont actuellement domptés par de patentés empêcheurs de vraie vie, naturelle, saine, immunisante…, nous tenons à poursuivre nos rendez-vous de survie, de vitalité… La graine de compétitrice, Laurence, ne demande qu’à s’épanouir ; nos amis sportifs, à ne pas végéter ; quant à moi, sans ces moments buissonniers, je me sens tel une rustique herbe sauvage en plein milieu d’un champ de maïs OGM ; tous bien alignés, étouffants, ils m’empêchent les caresses du vent et pompent tous les nutriments. Mais quand, bien gras, ils seront coupés par le pied – alimentant le cycle des malbouffes -, leurs racines pourriront et celles de ma race, coopérant avec une faune non moins sauvage, repousseront… Que ce semi-marathon inaugurant 2021 soit le sillon servant un semis de belle saison sportive à venir pour les « Bêtes de course » !

Texte et photos : Daniel Guyot

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