A moins de deux mois des Jeux Olympiques (27-30 juillet), la vague de Teahupo’o a démontré qu’elle était très certainement la plus belle scène au monde pour une compétition de surf.
Dans un décor paradisiaque et des vagues de 3 à 4 mètres, la 26e édition du Tahiti Pro restera certainement comme l’une des plus belles. Historique même, avec la victoire de Vahine Fierro. La Française, première Tahitienne à inscrire son nom au palmarès à Teahupo’o, est désormais la grande favorite pour l’or olympique. Un but que ne pourra pas viser le champion olympique en titre brésilien Italo Ferreira, vainqueur la nuit dernière chez les messieurs mais non qualifié pour les JO de Paris 2024.

Le Tahiti Pro s’est refermé ce jeudi après-midi à Tahiti par une dernière journée incroyable. Des vagues parfaites, pas de vent, du soleil, un large public dans le chenal et la victoire d’un revenant en la personne d’Italo Ferreira, blessé l’an dernier et qui n’a pu se qualifier pour les JO qu’il a remporté en 2021 à Tokyo. Après avoir dominé Cole Houshmand (USA) en 8es, Yago Dora (quarts) en quarts et Ramzi Boukhiam (Maroc) en demis, Ferreira a pris le meilleur sur John John Florence (Hawaii), toujours placé mais jamais gagnant à Tahiti. Il manquera assurément quelqu’un dans huit semaines sur le spot du bout de la route.
Lui non plus ne verra les JO alors qu’il est chez lui à Teahupo’o et qu’il s’est encore offert un beau parcours. Mihimana Braye, vainqueur des trials, a sorti le n.1 mondial américain Griffin Colapinto mercredi, pour rivaliser avec JJ Florence jusqu’à la dernière seconde, ne s’inclinant que de 14 centièmes face au futur finaliste et nouveau leader du classement général. Quart de finaliste l’an dernier, “Huncho” est un crack à Teahupo’o.

Absent à Tokyo, Kelly Slater ne participera pas non plus aux Jeux de Paris, et ne sera certainement jamais un Olympien. Le 11 fois champion du monde, wild card de la compétition, s’est offert un quart de finale après une victoire au buzzer sur le jeune australien Ethan Ewing. A 52 ans, il a toutefois manqué d’énergie au tour suivant face au Marocain Ramzi Boukhiam. Lequel signe la meilleure performance de sa carrière avec une 3e place au Tahiti Pro. Trois mois après sa médaille d’argent aux World Surfing Games, Boukhiam grimpe à la 11e place du CT et devient un prétendant à la médaille olympique tant son surf a impressionné ces jours-ci dans les tubes polynésiens.
Au rayon des favoris aux Jeux, comment ne pas citer John JohnFlorence et Gabriel Medina qui ont offert un récital tout au long de la dernière journée. L’Américain s’est offert une nouvelle finale après avoir écarté le Brésilien en demis et, s’il n’est pas parvenu à s’imposer, sa science du tube backside et des drops verticaux en fait un candidat légitime à l’Olympe. Tout comme Medina, qui n’a pu s’offrir une 5e finale à Teahupo’o où il s’est imposé deux fois (2014 et 2018). Auteur d’un 10/10 et du meilleur total de la compétition en 8es (19,83 pts), le triple champion du monde a survolé la compétition par son engagement, avant de commettre quelques erreurs et une chute malencontreuse sur la première vague de sa demi face à Florence.
Phénoménale de technique, d’engagement, de physique, de stratégie et de mental, Vahine Fierro a quant à elle brisé le plafond de verre des demi-finales (2022 et 2023) pour aller chercher la victoire que tout le monde lui promettait. Elle a depuis mercredi tous les regards braqués sur elle et l’étiquette de favorite épinglée au lycra. Mais attention à certaines filles qui, dans un Teahupo’o effrayant pour nombre d’entre elles, ont su élever leur niveau pour faire passer le surf féminin dans une autre dimension.
A commencer par la Brésilienne Tatiana Weston-Webb, auteure du 10 parfait en demi-finale face à Fierro dans ce qui est désormais considéré comme la plus belle série de toute l’histoire du surf féminin. Sans oublier la Costaricienne Brisa Hennessy, finaliste face à la Française, est très à l’aide dans son backside pour dénicher de beaux tubes. Si elle a raté sa demi-finale, l’Américaine CarolineMarks, vainqueur l’an dernier à Tahiti, est une fois encore dans le dernier carré. Redoutable dans les tubes jusqu’à 2m, elle a eu plus de mal dans des vagues un cran au-dessus. Tout comme MollyPicklum, balayée par Fierro en quarts, alors qu’elle avait atteint la finale à Pipeline en janvier. Moins en verve dans ce maxi Teahupo’o, la championne olympique américaine Carissa Moore s’est elle aussi arrêtée en quarts pour son retour à la compétition, alors qu’elle a décidé de ne pas suivre le CT cette saison.
Victorieuse à Pipeline en ouverture de la saison et leader du classement général, l’Américaine Caitlin Simmers a été transparente cette année, alors qu’elle avait atteint la finale l’an passé. Quant à Johanne Defay, n.2 mondiale avant Tahiti et désormais n.4, la Française a énormément progressé sur la gauche de récif où le tube est la figure majeure. En témoigne son 8,83 pts en série de repêchages face à l’Australienne Tyler Wright. Mais elle n’a toujours pas réussi à passer ce cap en trois participations. On la sait suffisamment travailleuse pour gommer les dernières imperfections et frapper un grand coup aux Jeux, dont elle avait pris la 9e place à Tokyo.
Si 18 des 48 qualifiés pour les JO ont participé au Tahiti Pro, cela veut donc dire que les 30 autres l’ont regardé devant leur écran de télé. Ou de très près pour Kauli Vaast, qui a sillonné le spot sur son jet ski ces deux derniers jours après avoir pris les bombes lors des sessions d’échauffement matinales. Finaliste en 2022, le Français n’a pu bénéficier d’une wild card cette année alors qu’il joue la médaille olympique dans deux mois. Si le moment n’est pas aux regrets, il aurait assurément fait le show dans un Teahupo’o de cette dimension. Espérons les mêmes conditions fin juillet à Tahiti et Vaast saura démontrer qu’il est un des meilleurs, sinon le meilleur, sur son home spot.
Au chaud dans les Landes, Joan Duru, le quatrième qualifié français, aurait bien aimé un tour de chauffe sur cette vague où il a signé un quart de finale en 2018, quand il était pensionnaire du CT. Duru arrive ce lundi à Tahiti pour deux mois de préparation qui le mèneront jusqu’aux Jeux. Expert des tubes, il va peaufiner sa préparation finale pour arriver à 100% aux Jeux.
Quant à tous les autres qualifiés venu(e)s des quatre coins de la planète surf, on imagine que certains ont rêvé se voir dans ces cavernes liquides. Comme on pense à tous ceux qui commencent à angoisser à l’idée d’affronter cette vague pouvant s’avérer cauchemardesque. Aussi belle et magique qu’elle puisse être, Teahupo’o n’est pas à la portée de tous. On l’a encore vu ce jeudi. John John Florence s’est fait remuer comme jamais, Gabriel Medina s’est entaillé le flanc droit, Mihimana Braye a tapé la tête (casquée) sur le récif, et on ne compte plus le nombre de planches cassées en deux jours.
En plein hiver austral, la houle sera maître du destin et des performances de chaque qualifié pour les JO. Les vagues pourront y être petites, grosses, très grosses, glassy ou mouvementées avec le vent dominant qui peut souffler fort en juillet. Théâtre des rêves, Teahupo’o choisira de toutes façons, et comme toujours, ses champions.

Photos WSL

LE PALMARÈS DU TAHITI PRO 2024

Dames
1 – Vahine Fierro (France)
2 – Brisa Hennessy (Costa Rica)
3ex – Tatiana Weston-Webb (Brésil) et Caroline Marks (Etats-Unis)
9 – Johanne Defay (France)

Messieurs
1 – Italo Ferreira (Brésil)
2 – John John Florence (Etats-Unis)
3ex – Ramzi Boukhiam (Maroc) et Gabriel Medina (Brésil)
9 – Mihimana Braye (Polynésie française)

CALENDRIER DU CHAMPIONSHIP TOUR
29 janvier – 10 février : Pipeline, Hawaii
12 – 23 février : Sunset Beach, Hawaii
6 – 16 mars : Péniche, Portugal
26 mars – 5 avril : Bells Beach, Australie
11 – 21 avril : Margaret River, Australie
22 – 31 mai : Teahupo’o, Tahiti
6 – 15 juin : Punta Roca, Salvador
22 – 30 juin : Saquarema, Brésil
20 – 29 août : Cloudbreak, Fidji
6 – 14 septembre : WSL Finals, Lower Trestles, Etats-Unis

CALENDRIER DES JEUX OLYMPIQUES
27-31 juillet : 1er tour aux finales
1-5 août : extra days si nécessaires

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