Le 31 octobre, Antoine guillon prenait le départ de l’Immortal Race /Athanatoi Dromos ! A ses côtés des pointures de la route GillesPalaruello et AngelPalaruello, deux Français coureurs sur route sur des longues distances. Il semble que des spécialistes des ultras distances sur route soient présents et cherchent à faire descendre le record de l’épreuve sous les 13h ! « Va falloir se bouger. Beau challenge en perspective ! » confie Antoine sur la ligne de départ.  JeromeCharton le Corse par exemple, ou d’autres étrangers habitués du Spartahlon et double Spartahlon ! ! C’est parti.

 

« J’ai toujours été tenté par un 24 h ou par le Spartathlon, sans jamais avoir osé franchir le pas ; ça viendra plus facilement désormais. Retour sur une découverte :

Départ de Tripoli, dans le Péloponnèse, au pied de la statue de Kolokotronis.

Je suis le mouvement en traversant la ville sur 2 km, au milieu des voitures et des scooters, des piétons qui traversent, devant les tavernes aux terrasses bien occupées par les clients attablés.

Je surveille ma vieille montre sans bracelet qui m’indique encore la distance (je la sors vraiment exceptionnellement celle-là), et je note 4’50 pour le 1er km, autant pour le second. Je ne sais pas si c’est bien, ça me permet en tout cas d’occuper la 9e place et de voir au loin les premiers s’éloigner. Il paraît qu’il y a aujourd’hui de bons spécialistes de la discipline, présents à cause de l’annulation du Spartathlon, c’est intéressant. Je ne me fais donc pas d’illusion et je reste concentré sur mon allure, en me disant qu’à cette vitesse cela donnerait moins de 12 h à l’arrivée. Comme j’en ai prévu 13, j’imagine que je devrai ralentir plus tard.

Je reste à l’écoute, je pense à la chance que j’ai de pouvoir participer à une compétition en cette période. Le rythme est très agréable, et contrairement au trail, il n’y a pas de difficulté à manger, ni à observer le terrain, ni à encaisser des variations de cardio ; juste à faire attention aux sensations musculaires, car je crains la casse ou les crampes. J’en profite pour manger des barres Effinov chaque heure, ce que je fais rarement, et constate leur effet dynamisant. Comme le rythme est linéaire, il est plus évident de sentir un effet positif ou négatif d’un choix alimentaire. C’est ainsi que je me suis rendu compte de la bonne efficacité de la patate douce, du riz, des barres, et d’un effet moyen de la banane (dans ces circonstances).

Après plusieurs ravitos (tous les 4 à 7 km) je laisse mon sac à Anne pour tenir la bouteille à la main. Je dois m’alléger et être très rapide sur les arrêts qui sont à peine marqués par les autres coureurs. Avec Anne nous nous adaptons en 3h, puis ça roule.

Au marathon, je passe en 3h23, un peu plus de 12 km/h, une allure qui me va bien. Le dénivelé est bien présent.

La nuit tombe à 18 h en même temps que se lève la pleine lune, c’est très beau. Très peu de maisons, des collines boisées, des oliveraies, des cultures fruitières variées, un hameau de temps en temps, un petit village. Parfois je croise un pick-up avec des chèvres dans la benne ou en surcharge avec son chargement de bois ! C’est folklorique.

Désormais je suis rentré dans la course, l’allure est calée, je suis assez confiant pour le dosage de l’effort. Le cumul de D+ est vraiment intéressant ; ce n’est quasiment jamais plat. Pour les chaussures, les Clifton 6 sont parfaites.

J’ai réussi à grignoter 3 places quand Anne m’informe que le 1er est à 21’, le second à 17, et les 3 autres à 8’. Il me reste 20 km avant Sparte, d’où commencera la longue ascension du Taygète (26 km pour 1 100 m+, suivie des 36 km de descente jusqu’au final.

J’accélère un peu et rejoins les 3 coureurs à l’entrée de la ville, inespéré.

 

Ravito express devant la statue de Léonidas (pas celui des chocolats mais de la bataille des Thermopyles) et je repars avant eux, à 8’ de Christos Mavrikios, un coureur qui avait terminé 3e à l’Ultra Pélion Trail derrière Guillaume Le Normand et moi.

Le cheminement dans la ville est bien signalé, à coup de grosses flèches blanches peintes sur la route. Je connais bien le secteur pour avoir visité plusieurs fois le site de Mystra à 5 km de là. Les « singcharitiria » fusent (félicitations en grec), c’est sympa.

En moins de dix minutes je me retrouve seul dans la campagne, avec au loin et perchée dans la montagne la cité byzantine de Mystra tout éclairée.

Km 85, je dépasse Christos qui semble bien mal à l’attaque de la montagne. Il marche ; Anne me dit que le 1er est à 13’.

Je suis content de trouver une bonne montée. Bien sûr, comparée au trail nous dirons qu’elle est roulante et j’y maintiens pile 10 km/h de moyenne. Musculairement, changer de sollicitations est un soulagement. Je me rapproche de Dimitris Theodorakakos et j’avoue croire possible de le rattraper. Il fait de plus en plus froid, j’enfile mes gants et je supporterais bien un bonnet.

La pleine lune offre un spectacle permanent et illumine les parois rocheuses. La route emprunte un tunnel et des voûtes de roches. Parfois, des éboulis récents ont défoncé la route pendant leur chute. Nous avons de la chance avec la météo cette nuit.

Je passe le 100e km et 2 200 m+ en 8h23. Je suis à 9’ du premier ; je grappille mais cela reste régulier, ce qui signifie que Dimitris est en gestion.

Enfin le sommet, 106 km, 6’ de Dimitris. De là, j’accélère aussitôt ; d’abord parce que j’ai vraiment froid, ensuite, si je veux le rejoindre, il me faut produire un effort significatif. Les km s’enchaînent à 4’20, mais l’écart diminue à peine ; pire, il arrive que je perde un peu de temps. Il est vraiment fort et a dû gérer l’écart. C’est super motivant. Je me régale, déjà très content de la tournure qu’a pris cette course avec un chrono qui devrait représenter du 12 à l’heure si la machine tient bon !

Au 130e, je suis à 5’ mais une nouvelle bosse apparaît, 200 m+ en 3 km. Je tente le tout pour le tout en maintenant du 12 de moyenne sur cette portion à 6 % de pente et enfin, pour la 1ère fois, j’aperçois la frontale de Dimitris deux lacets plus haut. Je prends un repère visuel et y arrive 3’50 après. Au sommet, encore un peu plus proche, il reste 10 km. La vue sur la baie de Kalamata est magnifique. La mer scintille des reflets lunaires ; les lumières de la ville m’indiquent le port, le castro, la place de l’arrivée… De l’autre côté de la baie le bout de l’anse est marquée par la forteresse vénitienne de Koroni, elle aussi éclairée, à 40km à vol d’oiseau. Je pense à mon matelas de sol qui m’attend dans la tente tout près de Koroni, mais je me reprends ; avant cela je dois terminer cette cavalcade !

Le début de la descente me tiraille les mollets ; je dois temporiser un km, puis je reprends un bon rythme sans jamais me rapprocher de Dimitris que j’aperçois parfois plus bas avec une voiture suiveuse.

L’entrée dans Kalamata est déserte, normal à près de 02 h du matin, même pour un pays méditerranéen.

Je garde une bonne cadence jusqu’à l’arrivée, on ne sait jamais, mais sans surprise, je débouche à mon tour sur la place centrale en seconde position, achevant ma course au pied de la statue de la Victoire représentée par Grigorios Dikaios, Theodoros Kolokotronis et Petrompeis Mavromichalis, à 5’ de Dimitris !

Au final cela donne 11h48’ pour 142 km et 2 500 m+, un temps qui m’étonne vraiment et me donne des envies de découvrir d’autres formats routiers, et pourquoi pas ce fameux 24 h qui me titille. A 50 ans, il serait temps »!!

Texte et photos Antoine Guillon

 

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