Il a la bougeotte Daniel Guyot. Cet insatiable des trails en pleine nature n’a de cesse de parcourir les monts et les montagnes en quête de challenges. Avide des grands espaces, pas un sentier ne lui résiste dans l’océan Indien, les Pyrénées et dans sa Bretagne natale. Cet assoiffé d’aventures revient pour nous sur sa saison 2024, chaussures aux pieds et plume à la main.
En cette année olympique ayant créé un sursaut sportif français – avant la baisse drastique annoncée pour le budget 2025 -, une sorte d’hystérie collective s’est emparée du trail qui, lui, ne manquera pas de moyens : d’un graduel engouement post Covid, est survenue une ruée aux dossards ; nul besoin de multiplier les chiffres pour démonstration : c’est un fait évident. Outre les frustrations d’inscriptions prises d’assauts, sur le terrain ça donne des courses souvent saturées ; beaucoup s’en accommodent n’ayant pas connu autre chose ; certains le déplorent. Tout dépend de ce qu’on vient chercher ; en tant que coureurs : des médailles et tee-shirts, de la visibilité sociale, ou plutôt de la santé et de l’épanouissement ? En tant qu’acteurs de ce développement : du business en lien avec influenceurs des réseaux sociaux, ou plutôt la passion de proposer de belles courses ? Il devient opportun de choisir en connaissance de cause.
Quelques chiffres persos
Comme à l’ordinaire, j’aurai parcouru environ 5 000 km et grimpé plus de 150 000 m D+, tout n’étant pas forcément sur Strava – application laissée par défaut depuis l’usage obligé sur trails OFF -, soit par choix de discrétion, soit par décharges du GPS sur très longs trips (dont des fins d’ultras). Je n’enregistre ni les trop rares sorties à vélo, ni la nage.
Encore sur une cinquantaine d’épreuves officielles en tout genre durant l’année 2019, j’ai désormais opté pour une modération en privilégiant le qualitatif (environnement, modalités d’inscription, déroulement, ambiance conviviale, valeurs portées par les organisations…) J’en ai courues 36 en 2024 (33 podiums catégoriels) ; dont une douzaine de courses sur route (soit le tiers en nombre mais évidemment beaucoup moins en km…) ; des 10 km, 2 semi marathons (ADH et Etang Salé), un marathon qu’il faut aller chercher hors Réunion… Deux équipes éclectiques montées pour relais : le marathon de la Plaine des Palmistes à 8, « Les Intrépides » ; le semi marathon des marrons de Sainte-Suzanne à 7 « Les Potes-Ti-Marrons ».
Mireille a fait 34 courses (26 podiums catégoriels) ; avec très peu d’entraînement en marge d’un travail qui l’accapare, mais les bienfaits du foncier dans les Pyrénées et en Bretagne… Faut dire que récupérer ses chats dans le quartier, exige du fractionné et de la gymnastique…
Mon agenda des « compétitions »
Mes courses sont le moins possible programmées – sauf obligations pour les ultras – et procèdent idéalement d’improvisations adaptées aux situations du moment ; je n’en fais jamais un objectif à préparer ; et il m’est même arrivé d’oublier une inscription dûment réglée, telle la course du Tévelave/Avirons, « Sclérose en plaques » du samedi 10 février… La répartition globale s’avère plutôt équilibrée par une alternance de formats courts et longs, de résistance et d’endurance. Aucun programme d’entraînement, aucune planification des épreuves : courir doit demeurer une disposition non forcée, selon des parcours globalement non codifiés, avec les motivations du moment, les envies de récupérer, celles d’évasion sauvage dans la nature en mode trek… L’année se sera clôturée par un joli bouquet final : 3 courses d’affilée les 20, 21 et 22 décembre (Marrons, Foulées Liberté, Verval).
Plus d’ultras que les années précédentes : un retour aux sources ; outre la rituelle Diagonale des Fous le 20 octobre, il y eut le 1er UTG (Ultra Trail des Géants) le 5 mai, puis l’original Poon Tour le 7 juin, ultra d’orientation en duo avec Arnaud Moisan, peu avant de me relancer le 29 juin sur l’Ultra-Marin Breton, 175 km… Donc, un 1er semestre bien rempli en longues escapades… Côté ultras, Mireille s’est contentée de la traversée classique 97.4. Pas mal de trails longs également dont les Trophées Océan Indien by UTOI (Ultra Trail Océan Indien) le 1er juin, la Cimasarun, course des 3 cirques by Randorun.OI le 31 août, le tour de l’île Rodrigues by Rod Trail (Trail du Hibou 75 km) le 3 novembre, la Boucle du Cœur de l’Est by UTOI le 7 décembre…
Au calendrier réunionnais, – et merci à Michel Jourdan de si bien le tenir – la répartition des épreuves demeure perfectible, et les réalisations encore quelque peu instables avec des annulations de courses telles le Cross Bassin Bleu (météo), la course de côte de Beaumont, les foulées MICI, le Baril (ces 2 dernières pour manque d’effectif, un comble dans le contexte !)
Mes territoires et terrains de trails
Le bilan Strava me donne en classement des principaux lieux où je cours, de fort beaux endroits sur la planète :
1 – La Réunion
2 – Hautes Pyrénées
3 – Maurice – Rodrigues
4 – Bretagne
Les environnements investis sont contrastés ; des hautes montagnes et des bords de mer (océans Indien et Atlantique, Manche) ; des névés, glaciers, lacs gelés, et des pistes sablonneuses, coralliennes ou basaltiques, longeant les lagons… De fraîches forêts de chênes et de frênes ; d’arides savanes et luxuriances tropicales humides. Il convient de trouver un juste milieu entre l’ouverture exploratoire au monde, et des ancrages.
En complément de Saint André des Eaux, et Vannes, en Bretagne je ne manque jamais de faire quelques courses estivales dans les Côtes d’Armor : encore Courir la Digue cette année à Pléneuf Val André, rituel du 14 juillet, mais également une nouveauté pour moi en guise de récup’active juste après l’Ultra-Marin, la course de l’Ic via le sublime GR 34 qui m’est si familier. J’ai eu le privilège d’inaugurer le format XL du Trail des Mines avec son dynamique Président, Guirec Le Chevanton, une très intéressante épreuve de Trémuson qui dispose de belles vallées où je pars cavaler les doux soirs d’été parmi les chevreuils, sangliers, lièvres…
La guindée Chamonix s’est tellement éloignée de celle de mes 20 ans que je ne la fréquente plus guère ; en 2018, ce ne fut que pour le parcours UTMB OFF en totale autonomie, après avoir couru l’Ultra Tour du Beaufortain, ce fief de François D’Haene encore paisiblement fréquentable. Reconnaissance à François Camoins pour sa présidence passée. Je garde des liens à distance avec les éditions Guérin et une bonne boîte locale d’équipements.
J’ai fait deux fois plus d’escapades dans les Hautes Pyrénées qu’en 2023, avec de confidentiels parcours entre pics et crêtes où je ne croise que des isards et quelques passionnés de montagnes. Dans l’esprit Jornet avant l’heure, mais en bien plus soft… Je me fixe simplement une heure de départ, puis au dernier moment, un lieu à partir duquel j’improvise. Ma seule préoccupation est de prévoir les violents orages. J’ai la chance d’avoir un pied à terre dans cet environnement très privilégié que j’explore hors des sentiers battus, en des paysages qui n’ont vraiment rien à envier aux Alpes, très loin s’en faut.
Des démarches engagées en 2024 qui deviennent des résolutions 2025
Ma fidélité à certaines courses locales ne doit pas céder à me sentir faire le hamster dans des ambiances qui se dégraderaient. En revanche, Cross Edmond Albius, 10 km Plaine Palmistes, Course de l’Ail, Cimasarun, Diagonale des Fous, j’y récidive avec plaisir. Mais la Kalla que j’ai beaucoup faite, plus question ; Trail des Anglais, The place to be, mais pas pour moi qui trouve l’effectif trop bondé pour la technicité, (j’y ai été bénévole des années et je comprends les ressorts de l’engouement). En métropole, je ne raterais pas une édition du marathon de Saint André des Eaux ; bosselé, fréquenté par d’atypiques coureurs dont de capés centbornards tel, sans défaut, l’ami Mickaël Jeanne – 32 participations au 100 km dont 7 fois vainqueur, souvent dans le top 3, toujours sur le podium catégoriel -, organisé depuis 44 ans par la petite mairie dans le cadre d’une fête champêtre, c’est un rendez-vous d’exception. Sélectionner avec discernement les courses au meilleur esprit, me devient une priorité.
Je reste très attentif à de nouvelles propositions : de bonnes surprises avec, par exemple, avec le « Maloya Trail » le 11 novembre (fédérant deux grandes commémorations historiques, l’armistice en métropole, et la fin de l’engagisme à La Réunion) ; un très beau parcours dans le Sud Sauvage (Piton Sainte Rose, Pointe Corail…)
En dépit des « Running Stones » acquis, et des relances par des mails de l’organisation, je n’ai fait et ne ferai aucune course by UTMB. Je ne partage aucunement les options prises par cette hégémonique entreprise mondiale.
Une participation aux courses de la première année UTOI, m’a donné des satisfactions. Outre l’épreuve phare, la traversée UTG : les Trophées OI, une belle idée rapprochant nos îles, et la Boucle du Cœur de l’Est, très nature et exigeante ; en espérant une bonne évolution pour cette sympathique organisation qui revalorise le créneau de mai occupé jadis par La Passe Montagne, et que certaines barrières horaires imposées pour l’Ultra Terrestre 225 km ne créent pas un basculement brutal du populaire local à l’élitisme extérieur… Pour les organisateurs comme pour les coureurs, trouver le bon équilibre en trail est tout un art !
Devenu très distant des réseaux sociaux à la mesure de leur emprise globale de bas niveau incompatible avec le goût des sommets sauvages, j’ai intensifié mes prédispositions animales, renforçant mes ancrages dans le monde des montagnards, en marge de celui des néo-traileurs – je suis un dinosaure – que je respecte pour autant, et parmi lesquels j’ai bon nombre d’amis, à qui je souhaite une belle année sportive 2025.
Texte et photos Daniel Guyot